Le Nord-ouest du Tchad: la prochaine zone à haut risque?

kanemLe Nord-ouest du Tchad pourrait devenir la prochaine zone sahélienne d’implantation du trafic de drogues et des groupes fondamentalistes si le gouvernement tchadien continue de négliger la plus pauvre des pauvres régions de ce pays instable.

Le Nord-ouest du Tchad: la prochaine zone à haut risque? , le dernier briefing d’International Crisis Group, examine les conséquences conflictuelles d’une politique d’abandon par le gouvernement central, de problèmes locaux structurels (l’intensification de la compétition intercommunautaire pour des ressources naturelles en voie de raréfaction et le déclin des mécanismes traditionnels de gestion des conflits) et de dynamiques externes néfastes (l’augmentation du trafic de drogues et la présence du fondamentalisme musulman). La combinaison de ces facteurs pourrait créer une dynamique déstabilisatrice pour cette région de ce vaste pays, relativement épargnée par la guerre civile ces dernières années, s’ils ne sont pas rapidement et sans ambigüité traités.

“Compte-tenu de la situation de sous-développement et de sous-administration aigus du Nord-ouest, le ressentiment des populations locales contre le gouvernement central atteint un seuil de plus en plus dangereux”, analyse Saad Adoum, du programme Afrique centrale d’International Crisis Group.

Historiquement, la région Nord-ouest a toujours été difficile à contrôler et administrer. Le gouvernement actuel n’a pas rompu avec la logique d’abandon de ses prédécesseurs qui a consisté à privilégier une gouvernance sécuritaire au détriment d’une gouvernance développementaliste. Par ailleurs, en raison de sa position stratégique, la région du Nord-ouest est, depuis quelques années, la cible de tentatives d’infiltrations de la part de groupes armés et de bandes criminelles profitant de la porosité du désert saharien pour étendre leur champ d’activité. L’islamisme combattant qui sévit au Nord du Nigeria et Al-Qaeda au Maghreb islamique (AQMI) qui opère dans certains Etats du Sahel y font sentir leur influence diffuse mais réelle.

N’Djamena doit urgemment mettre en œuvre un programme de développement du Nord-ouest, fondé sur les besoins des populations, et concevoir un nouveau système de gouvernance local. Le gouvernement doit mettre un terme à sa politique de cooptation et d’intimidation des autorités traditionnels et appréhender le développement et la sécurité comme des questions liées dans un contexte d’accroissement de la compétition pour les ressources naturelles.

La lutte contre la pénétration des menaces extérieures – qu’il s’agisse de groupes terroristes ou du trafic de drogues – passe par l’engagement du gouvernement tchadien dans les initiatives de coopération internationale dans la bande sahélo-saharienne et surtout par l’accroissement de la coordination et de l’échange d’informations avec les pays voisins comme le Nigeria, le Niger et la Libye qui partagent les mêmes intérêts de sécurité.

« Ayant été une grande pourvoyeuse en combattants des différents groupes armés des guerres civiles tchadiennes et étant le vaste théâtre d’antagonismes intercommunautaires exacerbés par la concurrence pour les ressources, la région du Nord-ouest risque d’être à l’origine du prochain problème majeur de sécurité au Tchad, voire de la fragile bande sahélienne, si ses vulnérabilités continuent de ne pas être traitées », souligne Thierry Vircoulon, directeur du programme Afrique centrale d’International Crisis Group.

Laissez votre commentaire